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#2 - Un terrible événement

Dimanche dernier, alors que nous venions de terminer notre petit-déjeuner, le téléphone a sonné. Il venait nous annoncer une terrible nouvelle: l'un de nos élèves, Salman, vient de décéder. Il avait 7 ans et était en classe I à DKK .


C'est Roma qui a décroché, elle s'est immédiatement retournée vers sa mère: 'Mamma, a child died in the village'. Alors que Marie-Christine saisissait le téléphone, je pensais avoir mal entendu, ou peut-être serait-il plus correct de dire que je l'espérais.

La conversation fut courte et dès qu'elle eut raccroché, Roma et moi avons demandé en coeur 'Que s'est-il passé?'. Comme si comprendre les causes de cette mort nous permettrait de mieux l'accepter. 'Il s'est électrocuté' a simplement répondu Marie-Christine, puis elle est retournée faire son linge. Il y avait eu dans sa voix et dans son regard quelque chose de très légèrement différent de d'habitude: sa détermination, son autorité et sa confiance dans l'avenir étaient intactes, mais ce petit quelque chose trahissait un immense bouleversement.

Roma et moi sommes restées là, dans ce joli salon baigné de lumière, dans un état confus, sans savoir quelle émotion primait: l'étonnement, l'incompréhension, la tristesse ou la colère.


Je ne connaissais pas cet enfant et pourtant, pour la première fois depuis mon arrivée ici, j'ai été réellement et profondément affectée. Vous êtes plusieurs à m'avoir demandé, au cours de ces dernières semaines, si le quotidien n'était pas trop rude ici, si la pauvreté n'était pas trop éprouvante, si je tenais le coup en somme. A vous tous, j'ai répondu que ce que je ressentais ici était avant tout du bonheur car je passe mes journées avec des enfants heureux malgré leurs difficultés.

Aujourd'hui, ce que je ressens est une profonde tristesse. La mort de cet enfant m'éprouve, au sens premier du terme, c'est-dire qu'elle me met à l'épreuve.


Une demi-heure après ce terrible appel, Marie-Christine est entrée dans le salon par la porte du jardin et sans s'arrêter ni ne nous jeter un regard, elle a simplement annoncé: 'J'y vais les filles'

'Tu prends ton téléphone maman?'

'Non'.

Cette réponse dégageait une vive violence. Pourtant, ni le ton ni le comportement de Marie-Christine n'étaient violents, mais les circonstances, l'atmosphère, apportaient à ce non une extrême dureté.


Marie-Christine a passé 4h en compagnie des proches de Salman. Au cours de la journée, une grande partie du village a rendu visite à cette famille endeuillée. L'enfant s'est électrocuté avec un appareil électronique alors qu'il jouait avec ses frères. Il a été enterré dans la journée.


J'ai longuement hésité avant d'écrire ces mots, et si j'ai pris la décision de le faire, c'est avant tout pour vous demander, à vous qui me lisez aujourd'hui, quelles que soient vos opinions et vos croyances, de porter Salman dans vos pensées et vos prières.


A bientôt, pour de meilleures nouvelles, je l'espère.


Tiphaine




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